Roselières basses à moyennes

Rédacteur : David Ollivier

Physionomie – écologie

Les roselières basses à moyennes sont des ceintures végétales situées au bord des cours d’eau ou des eaux dormantes. Composées de petits hélophytes généralement non graminoïdes, elles sont représentées par un ensemble de communautés végétales souvent dominées par une ou plusieurs espèces sociales qui leur confèrent leur apparence. Cet habitat est composé d’espèces héliophiles plus ou moins basses, généralement situées dans une zone de transition entre le milieu aquatique continuellement submergé par l’eau et le milieu terrestre ou parfois sur des sols hygromorphes. Il se développe souvent sur substrats vaseux à limoneux dans des eaux mésotrophes à eutrophes et se rencontre la plupart du temps en formation linéaire ou en petites nappes soit en mélange avec les roselières hautes (phragmitaie) soit en contact avec ces dernières. Ce type de roselière présente une grande variabilité en fonction des propriétés physico-chimiques de l’eau et du substrat au sein desquelles elles se développent. En effet, cet habitat se décline en 14 associations végétales et 4 alliances phytosociologiques. Ces différents types de roselière sont classés en fonction de l’espèce dominante et sont décrits sous la forme de communautés d’espèces :

Communautés des zones à nappe à faibles variations de niveau :

  • communauté à Grande Berle Sium latifolium ( Rorippo amphibiae-Sietum latifolii ) des fossés envasés ;
  • communauté à Prêle des rivières Equisetum fluviatile ( Equisetetum fluviatilis ), des eaux assez profondes, froides ;
    – communauté à Pesse d’eau Hippuris vulgaris ( Hippuridetum vulgaris ) dans les eaux courantes à stagnantes, froides, claires et riches en nutriments ;
  • communauté à Grande glycérie Glyceria maxima ( Glycerietum maximae ), formation végétale plutôt haute généralement en bande étroite le long des petits ruisseaux voire des fossés, se rencontrant souvent dans les prairies humides dans des zones fréquemment inondées par des eaux eutrophes ;
  • communauté à Acore vrai ( Acoretum calami ) plutôt thermophile ;
  • communauté à Rubanier rameux ( Sparganietum erecti ) caractéristique des eaux stagnantes sur des vases riches en minéraux et en calcaires ;

Communautés pionnières des bordures perturbées d’eaux calmes

  • communauté à Sagittaire ( Sagittario-Sparganietum emersi ) dans les eaux méso-eutrophes à écoulement lent ou parfois stagnantes ;
  • communauté à Butome en ombelle ( Butometum umbellati ) des eaux courantes à stagnantes à fort battement, formation végétale généralement ouverte caractéristique des eaux alcalines et minéralisées.
  • communauté à Oenanthe aquatique et de Rorippe amphibie ( Oenantho aquaticae-Rorippetum amphibiae ) située parfois au bord des roselières hautes ;
  • communauté à Scirpe maritime, non littorale, sur vases eutrophes des bords d’étangs ( Polygono-Scirpetum maritimi ) ;

Communautés des rives de fleuves et rivières

  • communauté à Baldingère Phalaris arundinacea ( Phalaridetum arundinaceae ), considérée comme une forme dégradée des roselières hautes à Phragmites (CB : 53.11). La phalaridaie forme des peuplements purs ou parfois en mélange avec Phragmites australis. Elle peut supporter des sécheresses importantes et prolongées et résiste bien aux pollutions et aux perturbations diverses. Elle forme souvent des ceintures végétales sur des sols jamais inondés (roselière terrestre).

Communautés subhalophiles

  • communautés de scirpes halophiles ( Scirpion maritimi ) caractéristiques des eaux plus ou moins saumâtres, représentées par plusieurs groupements : à Schoenoplectus tabernaemontani, à Bolboschoenus maritimus, à Schoenoplectus triqueter… Ces formations se rencontrent exclusivement sur la frange littorale de la région Poitou-Charentes.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF2004

PHRAGMITI AUSTRALIS-MAGNOCARICETEA ELATAE Klika in Klika et Novak 1949

PHRAGMITETALIA AUSTRALIS Koch 1926
Phragmition communis Koch 1926
Oenanthion aquaticae Hejny ex Neuhausl 1959
Phalaridion arundinaceae Kopecky 1961

SCIRPETALIA COMPACTI Hejny in Holub et al. 1967
Scirpion compacto-littoralis Rivas-Martinez 1980

CORINE 1991

53.14 Roselières basses à moyennes
53.15 Végétation à Glyceria maxima (GLYCERIETUM MAXIMAE)
53.16 Végétation à Phalaris arundinacea (PHALARIDETUM ARUNDINACEAE)
53.17 Végétation à scirpes halophiles (SCIRPION MARITIMI)

Confusions possibles

Cet habitat s’identifie facilement ce qui exclue toute confusion avec d’autres habitats. Cependant il peut parfois se rencontrer en mélange avec les roselières hautes à Phragmites australis (CB : 53.11) et former la strate inférieure de ces dernières.
D’autre part cet habitat, souvent présent en ruban le long des cours d’eau, peut se trouver pénétré par des espèces des prairies humides et des mégaphorbiaies voisines ce qui peut rendre l’identification plus difficile.

Dynamique

La dynamique naturelle va dépendre du maintien du régime hydrique des cours d’eau ou des étangs que ces roselières bordent. En effet, si la fréquence et l’importance des inondations diminuent, les conditions deviennent moins contraignantes pour d’autres espèces moins hygrophiles.
La dynamique progressive de cet habitat peut conduire à l’installation de grands hélophytes tels que les phragmites ou les massettes. Les formations à Grande Glycérie installées dans les fossés ou petits ruisseaux, laissent parfois la place à des cariçaies relativement pauvres semées de quelques saules.

Espèces indicatrices

[plante2] Acorus calamus, Alisma lanceolatum, Alisma plantago aquatica, Bolboschoenus maritimus, Butomus umbellatus, Equisetum fluviatile, Glyceria maxima, *Hippuris vulgaris, Oenanthe aquatica, Phalaris arundinacea, Rorippa amphibia, Sagittaria sagittifolia, *Sium latifolium, Schoenoplectus tabernaemontani, *Scirpus triqueter, Sparganium emersum, Sparganium erectum ssp. erectum, Sparganium erectum ssp. neglectum, Veronica anagallis-aquatica
[plante1] Baldellia ranunculoides, Eleocharis palustris, Oenanthe fistulosa
[briophytes] Fontinalis antipyretica, Octodiceras fontanum, Rhynchostegium riparioides

Valeur biologique

Ce sont des habitats d’interface entre le milieu aquatique et le milieu terrestre qui ont une fonction importante dans le cycle annuel de développement d’insectes dont les larves sont aquatiques tels que les Odonates et les Ephémères. Elles peuvent être utilisées comme support de pontes par certaines espèces d’amphibiens et comme site d’alimentation et de reproduction pour la faune piscicole. Souvent résistantes aux pollutions et perturbations d’origines anthropiques, les roselières jouent un important rôle épurateur et dénitrifiant. Certaines de leurs espèces végétales structurantes présentes un caractère de rareté régionale marqué : Sium latifolium, Scirpus triqueter surtout et, à un moindre degré, Hippuris vulgaris, Schoenoplectus tabernaemontani ou Butomus umbellatus.

Menaces

La simplification et les modifications – recalibrage, enrochements, bétonnage – apportées aux petits cours d’eau parfois considérés comme de « vulgaires fossés » portent gravement atteinte au maintien de ces habitats et ainsi au fonctionnement écologique global du cours d’eau et plus généralement des zones humides auxquelles ils appartiennent.
D’autre part les modifications du régime hydrique des cours d’eau (prélèvements d’eau en période d’étiage), se traduisant
par des kilomètres d’assec, ne sont pas pour favoriser le maintien de ces habitats qui vont être colonisés par des espèces moins hygrophiles plus compétitives. Par ailleurs, les faciès de l’habitat liés aux biotopes neufs ou perturbés – carrières inondées, fossés « nettoyés » – présentent une forte résilience à la pollution et aux brusques variations de milieux.

Statut régional

Dans la région Poitou-Charentes, ce type de milieu est assez rare à assez commun. Cependant le recalibrage des petits cours d’eau marqués par ailleurs par des assecs estivaux importants dans les secteurs à agriculture intensive sont à l’origine de la forte régression de ces habitats.