Grottes et cavités artificielles

Rédacteur : David Ollivier

Physionomie – écologie

Les grottes et les cavités artificielles ont une physionomie et des conditions de température et d’hygrométrie qui leur sont particulières.

Les grottes naturelles sont issues de la dissolution de la roche calcaire formant ainsi un réseau karstique. La région Poitou-Charentes compte plusieurs centaines de grottes naturelles. Leur développement reste cependant assez modéré si on le compare avec celui des cavités d’autres régions plus connues pour la pratique de la spéléologie, telles que celles Var ou de l’Aveyron. Les grottes se caractérisent par l’absence ou presque de lumière, une température généralement stable, une absence de courant d’air et une hygrométrie souvent élevée.

La combinaison de ces critères correspond aux exigences écologiques des chiroptères en hibernation, mais aussi en période de reproduction pour certaines espèces. Les chauves-souris cavernicoles recherchent en hiver des gîtes pourvus d’une ambiance fraîche et humide (10°C ; 80% d’humidité), une grande tranquillité et une absence de courant d’air. Une température plus élevée est indispensable pour la période de reproduction.

Les grottes comportent souvent des passages étroits parfois inaccessibles pour l’homme et permettant généralement la communication entre des « salles » de plus grands volumes.

Certaines grottes sont parfois caractérisées par le passage de rivières souterraines ou la présence d’une nappe phréatique.

L’entrée des grottes naturelles est généralement insérée au sein des parois rocheuses ou simplement se présente sous forme d’un gouffre situé à même le sol.

Les cavités artificielles, très nombreuses dans la région, se présentent généralement sous la forme de galeries labyrinthiques, hautes de plafond (2 à 3 mètres, quelques fois plus) avec un développement qui peut atteindre plusieurs kilomètres avec peu ou pas de dénivelé. La lumière y est là aussi absente, sauf dans les premiers mètres après l’entrée, la température généralement stable peut néanmoins connaître des écarts plus importants à la proximité des entrées et des puits d’aération. Ces derniers peuvent d’ailleurs être à l’origine de courants d’air qui parcourent une partie ou la totalité des galeries.

L’hygrométrie est généralement moins importante que dans les cavités naturelles.

Les cavités naturelles et artificielles de la région Poitou-Charentes constituent, en hiver, le milieu de prédilection des chauves-souris cavernicoles dont elles accueillent d’importantes populations. Par ailleurs quelques cavités naturelles abritent aussi de fortes colonies de reproduction. Ces populations sont, pour certaines espèces, d’intérêt national. Par conséquent, plusieurs de ces gîtes sont désignés comme sites à haute valeur patrimoniale (site Natura 2000, ZNIEFF, Site CREN).

Phytosociologie et correspondances typologiques

CORINE 1991

65.4 Grottes naturelles

88 Espaces souterrains artificiels (carrières, mines…)

Directive Habitats 1992

8310 Grottes non exploitées par le tourisme

Confusions possibles

Il n’existe pas de confusion possible avec un autre habitat naturel. Les abris sous roche sont très peu profonds et ne sont pas considérés pas comme des grottes car la lumière y pénètre dans leur totalité ou quasi-totalité. Généralement, ces excavations sont moins riches en biodiversité faunistique car elles ne réunissent pas les conditions nécessaires à l’hivernage ou la reproduction des chiroptères. Ces abris peuvent néanmoins accueillir temporairement quelques individus de chauves-souris en période de transit entre les gîtes d’été et d’hiver ou être utilisés comme gîtes secondaires au cours des nuits de chasse.

Dynamique

La dynamique végétale est nulle car la lumière ne permet pas à la végétation de se développer. Seules les entrées de grottes peuvent accueillir quelques fougères, accompagnées de quelques bryophytes, tant que l’apport de lumière reste suffisant. L’ouverture d’une entrée nouvelle va donc perturber l’équilibre de la grotte en créant un puit de lumière, mais aussi en favorisant l’apparition de courants d’air, en diminuant les conditions d’hygrométrie et en rendant la grotte plus vulnérable aux écarts de température. De telles ouvertures vont donc généralement nuire à la richesse biologique de la grotte.

Espèces indicatrices

[mammiferes] En hibernation : Barbastella barbastellus, Eptesicus serotinus, Miniopterus schreibersi, Myotis bechsteini, Myotis blythii, Myotis daubentoni, Myotis emarginatus, Myotis myotis, Myotis mystacinus, Myotis nattereri, Nyctalus lasiopterus, Nyctalus leisleri, Nyctalus noctula, Pipistrellus kuhlii, Pipistrellus nathusii, Pipistrellus pipistrellus, Plecotus auritus, Plecotus austriacus, Rhinolophus euryale, Rhinolophus ferrrumequinum, Rhinolophus hipposideros
En reproduction : Rhinolophus euryale, Miniopterus schreibersi, Myotis emarginatus, M.myotis, Rhinolophus ferrumequinum
Meles meles, Vulpes vulpes
[oiseaux] Chouette effraie (Tyto alba), Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes)
[lepidopteres] La Découpure (Scoliopteryx libatrix) ; en hibernation : Paon du jour (Inachis io), Vulcain (Vanessa atalanta)
[arachnides] Meta bourneti, Meta menardi

Valeur biologique

Les grottes naturelles et, parfois, les cavités artificielles jouent un rôle prépondérant pour le maintien des populations de chauves-souris. Ces mammifères sont tous protégés et figurent aux annexes II et/ou IV de la Directive européenne Habitats Faune-Flore.

Les grottes constituent des gîtes de reproduction ou d’hibernation, parfois simplement des gîtes temporaires pour les chauves-souris. Selon les espèces, elles sont fréquentées plutôt l’hiver ou plutôt l’été, soit par des colonies de mâles soit par des colonies de reproduction, et parfois les deux pour les espèces qui se reproduisent dans les cavités naturelles.

Certaines cavités de la région Poitou-Charentes abritent des colonies de chauves-souris dont les effectifs sont d’importance nationale et européenne.

Les grottes, outres les chauves-souris, accueillent une faune comprenant des espèces très spécialisées telles que l’Araignée cavernicole Meta menardi qui vit et chasse dans les grottes ou encore la noctuelle (lépidoptère) nommée « la Découpure » Scoliopteryx libatrix. Quelques papillons de jour fréquentent les grottes pour y passer la mauvaise saison comme le Paon du Jour ou le Vulcain. Certains animaux comme le Loir fréquentent les entrées de grottes où la lumière est faible mais encore présente. Le Blaireau, le Lapin ou le Renard peuvent à l’occasion y creuser leur terrier. Des oiseaux peuvent même y nicher à l’image du Troglodyte mignon ou du Rougequeue noir. Enfin les grottes peuvent servir d’abri à quelques amphibiens pour passer l’hiver.

Menaces

La fréquentation humaine est à l’origine de dérangements parfois fatals au sein des colonies de chauves-Souris. Les périodes hivernale et estivale sont particulièrement sensibles. Les chauves-souris plongées en léthargie hivernale vont utiliser l’énergie utile à leur hibernation à chaque réveil occasionné par d’éventuels dérangements. Cela peut compromettre leur survie lors du réveil printanier car elles sont alors trop faibles pour aller chasser. L’été ce sont les jeunes encore non volants qui sont menacés par l’affolement de la colonie qui risque de les faire tomber (à terre) sans possibilité d’en réchapper.

D’autres activités humaines parfois observées dans les cavités artificielles telles que le feu, l’organisation de soirées improvisées (« rave party »)… sont autant de menaces qui peuvent peser sur leur richesse biologique.

L’aménagement des grottes (création d’ouverture ou de nouvelles entrées) peut enfin modifier les conditions internes (température, hygrométrie) à un tel point qu’elles deviennent défavorables à l’installation d’une colonie de chauves-souris pour les années à venir.

Statut régional

Dans la région Poitou-Charentes, ce type de milieu est localisé aux régions au sous-sol calcaire. La Charente et la Vienne sont les départements où cet habitat est le plus fréquent. En revanche, en Deux-Sèvres, les grottes sont plus rares.

Les sites les plus remarquables sont intégrés et décrits dans les inventaires du patrimoine naturel récents (ZNIEFF, NATURA 2000) auxquels on se reportera pour plus de détails.

16 : grotte de Rancogne, Fosse Mobile, grotte de Grosbot
17 : carrière de l’Enfer, carrière de Fief de Foye
79 : carrières de Loubeau
86 : carrières des Pieds Grimaud, grottes de la basse vallée de la Gartempe, de la vallée de l’Anglin, carrière des Lourdines