Prévention des pesticides dans l’eau potable

Prévention des pesticides dans l’eau potable

Lettre ouverte de Vienne Nature, LPO Poitou-Charentes et UFC Que Choisir 86 en réponse à M. le Préfet et l’ARS

Fontaine-le-Comte, le 13 février 2024

Monsieur le Préfet,

Nous avons bien reçu le 16 janvier dernier, sous en-tête de l’ARS, votre réponse à notre courrier du 16 novembre 2023, et nous vous en remercions.

Nous avons le plaisir de noter que nous sommes d’accord sur un constat : depuis le précédent des arrêtés Fontaine-de-Maillé et La Preille, vos arrêtés de déclaration d’utilité publique (DUP) de captage d’alimentation en eau potable (AEP) ont bien pour objet la prévention des pollutions, qu’elles soient accidentelles ou diffuses ; d’autre part « la réglementation relative aux DUP n’est pas adaptée à la lutte contre les pollutions diffuses », la raison principale étant la non-prise en compte de l’Aire d’Alimentation de Captage, carence que nous avons soulignée dans notre courrier et que vous soulignez à votre tour.

Nous regrettons vivement que vous constatiez cette difficulté sans en tirer les conséquences et que vous ne répondiez pas aux demandes que nous vous avons présentées pour la surmonter.

Vous ne répondez pas à nos demandes de respecter la réglementation en dotant tous les captages d’AEP exploités d’arrêtés de DUP, donc de Périmètres de Protection, et de réviser vos anciens arrêtés afin de les adapter à la prévention des pollutions diffuses.

Vous ne répondez pas à nos demandes de prescrire dans les arrêtés de DUP, qu’ils soient anciens et révisés ou nouveaux, des périmètres de protection des captages adaptés à la prévention des pollutions diffuses, en prescrivant de délimiter l’Aire d’Alimentation de Captage et ses zones sensibles et de définir un Périmètre de Protection Éloigné englobant ces zones sensibles. Pourtant ces prescriptions entrent dans le champ de vos prérogatives actuelles.

Vous répondez par la négative à notre demande de prescrire dans les périmètres de protection des captages, révisés et nouveaux, des mesures de prévention des pollutions diffuses par nitrates et pesticides en arguant que votre droit à prévenir les pollutions diffuses ne concerne que le périmètre de protection immédiate, ce qui le rendrait inopérant. Vous ne citez aucun article réglementaire pour appuyer cette allégation et nous n’en avons en effet trouvé aucun.

Nous ne pouvons par conséquent que tenir pour acquise la formulation ministérielle que nous avons citée et que vous ne contestez pas : « les mesures prises dans le cadre des périmètres de protection n’excluent pas les mesures de protection contre les pollutions diffuses ».

Vous comprendrez notre déception devant votre refus d’utiliser au maximum les outils dont vous disposez dans l’état actuel de la réglementation pour faire avancer la connaissance des pollutions diffuses à l’échelle fine des aires d’alimentation des captages et pour doser des mesures de protection en fonction des réalités des terrains très divers où se situent les captages et en fonction des assolements et des niveaux très inégaux d’engagement des agriculteurs concernés. Cela permettrait, comme nous le souhaitons et comme vous semblez le souhaiter, de limiter les passages en Zones Soumises à Contraintes Environnementales (ZSCE) en laissant le maximum de chances à la concertation sans compromettre la santé publique.

L’eau du robinet continue à ne pas être potable pour les 2/3 de la population départementale et nous regrettons que, face à l’inquiétude croissante des citoyens, vous n’envisagiez aucune intervention des services de l’État pour hâter la mise en place de dispositifs de traitement pertinents. Vous vous contentez de répondre par l’ironie à une question que nous ne vous avons évidemment pas posée : certes, vous ne pouvez pas interdire une molécule dont l’usage est déjà interdit, mais vous pouvez diligenter des contrôles administratifs pour vérifier le respect de cette mesure et vous pouvez limiter les risques de nouvelles pollutions irrémédiables des captages d’eau potable.

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Préfet, l’expression de nos sentiments dévoués à l’intérêt général.

Les présidents de Vienne Nature et de l’UFC Que-Choisir de la Vienne, le délégué territorial de la LPO Poitou-Charentes

Crédit photo : Vienne Nature

Lire aussi :

24 janvier 2024 : Communiqué, lettre ouverte et pétition de Vienne Nature

Conférence 2023 : « L’eau potable en Poitou-Charentes »

Conférence 2023 : « L’eau potable en Poitou-Charentes »

Le samedi 28 octobre 2023, Poitou-Charentes Nature organisait, dans le cadre du 39e Festival International du Film de Ménigoute une conférence-table ronde en partenariat avec Mainate, Radio Gatine et avec le soutien financier de la région Nouvelle-Aquitaine et de la DREAL Nouvelle-Aquitaine :

« L’Eau potable en Poitou-Charentes : situations, problèmes et solutions possibles »

Depuis plusieurs dizaines d’années, de nombreux captages d’eau potable ont fermé en Poitou-Charentes, suite à des pollutions d’origine agricole : pollution aux nitrates, mais aussi aux pesticides. Dans un contexte de raréfaction progressive de la ressource, avec des sécheresses et canicules répétées, la régression des zones humides, la fourniture d’une eau potable de qualité, tant en quantité qu’en qualité, se pose de plus en plus. Il existe pourtant des solutions : développement de l’agriculture biologique, conservation des prairies, boisement d’une partie des périmètres de captages…

Cette conférence fait le point sur les constats et solutions applicables, bien trop peu mises en avant par les politiques publiques.

Enregistrement de la conférence

Les intervenants

  • Alain Persuy, administrateur à Vienne Nature et spécialiste de la forêt, nous explique le fonctionnement de la phytoremédiation ou comment les arbres peuvent être de véritable alliés dans la préservation de la qualité de l’eau

  • Christian Medeau, directeur du Syndicat d’eau de Lezay, nous décrit les aménagements faits sur un site de captage pour préserver la qualité de l’eau et comment ces zones peuvent aussi devenir des refuges pour la biodiversité

  • Damien Ladiré, coordinateur régional de la cellule RE Sources, nous présente le programme, sa manière de fonctionner, ses intérêts, ses enjeux et ses limites

  • Daniel Gilardot, administrateur à la LPO Poitou-Charentes, nous fait connaitre les différents outils que nous avons à notre disposition pour comprendre la qualité de l’eau de notre territoire

Cette conférence était animée par Alain Persuy, enregistrée par Nathan Braconnier de Mainate, montée et diffusée par Radio Gatine, avec le soutien financier de la Région Nouvelle-Aquitaine et de la DREAL Nouvelle-Aquitaine.

 

Pour une eau potable et sans pesticides

Pour une eau potable et sans pesticides

Suite aux découvertes sur la pollution de l’eau potable au Chlorothalonil à l’automne dernier, Vienne Nature et ses associations partenaires ont publié un communiqué de presse le 10 janvier 2024 ainsi qu’une lettre ouverte au préfet de la Vienne. Une pétition a également était co-lancée avec Greenpeace Poitiers.

Communiqué

Vienne Nature attend une réponse de la Préfecture concernant la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine.

Fontaine-le-Comte, le 10 janvier 2024

Face à la pollution au Chlorothalonil, Vienne Nature, la LPO de la Vienne, l’UFC Que-Choisir de la Vienne et les Coquelicots de Châtellerault interpellaient en novembre dernier le préfet de la Vienne pour lui demander de se saisir des outils réglementaires à sa disposition afin de limiter les risques qu’un autre pesticide reproduise demain la situation actuelle.

Car pour le métabolite du Chorothalonil, fongicide suspecté par l’ANSES de présenter un risque cancérigène pour l’hommele mal est déjà fait. Le Chlorothalonil, mis sur le marché en 1970, a été épandu pendant 50 ans et a été seulement interdit en France depuis 2020. Dans les 2/3 du département, les concentrations du métabolite suspect dépassent déjà la limite règlementaire pour l’eau du robinet. Elles ne vont pas baisser dans les années à venir, et devraient même augmenter compte tenu de la lenteur d’infiltration des eaux de pluie vers les nappes.

De plus, d’autres métabolites du Chlorothalonil, non recherchés à cette heure, pourraient à l’avenir aggraver la situation. Les deux tiers de la France et d’autres pays sont touchés : la Suisse, elle, cherche et trouve 8 métabolites du Clorothalonil !

Le préfet de la Vienne n’a donné suite ni au courrier de nos associations ni aux questions de la Nouvelle République (article du 19 décembre 2023). Nous réitérons, dans une lettre ouverte publiée ci-dessous, notre demande que l’État et le préfet de la Vienne prennent leurs responsabilités afin de protéger la population.

Lettre ouverte – Qualité de l’eau destinée à la consommation humaine dans notre département

Fontaine-le-Comte, le 10 janvier 2024

Monsieur le Préfet,

N’ayant pas reçu de réponse de votre part à notre courrier du 14 novembre 2023, nous réitérons notre demande et vous renvoyons ci-dessous notre courrier.

Au nom de Vienne Nature, j’ai l’honneur d’attirer votre attention sur la nécessité de prévenir la répétition des contaminations graves et durables qui altèrent depuis des décennies la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine dans notre département et mettent en danger la santé humaine. Les résidus de l’Atrazine et les métabolites du Metolachlore sont détectés et quantifiés depuis des années, dernièrement la présence quasi générale de métabolites du Chhlorothalonil découverte récemment a donné une dimension d’urgence à la prévention des pollutions diffuses.

Ces pollutions sur la longue durée sont irréversibles et ni les moyens techniques curatifs ni les moyens financiers disponibles ne permettent d’en pallier les effets dans des délais raisonnables. C’est pourquoi nous vous prions de bien vouloir mettre en œuvre tous les outils règlementaires dont vous disposez pour prévenir la répétition de pareilles situations.

Notre association a pris acte avec intérêt des arrêtés de DUP que vous avez signés en 2022 pour les captages d’eau potable de Fontaine de Maillé et de La Preille. Pour la première fois, vous y définissez l’objet des périmètres de protection en termes de protection « contre les pollutions diffuses » alors que vos précédents arrêtés se limitaient à la protection contre les « pollutions accidentelles ». En cela vous appliquez telles que traduites dans le SDAGE 20022-2027, les dispositions du Code de la Santé Publique et du Code de l’environnement.

Cependant nous avons regretté que dans les arrêtés cités plus haut vous n’ayez pas intégré dans la règlementation des périmètres de protection cet élargissement aux pollutions diffuses par nitrates et pesticides. Pourtant elles compromettent si gravement la qualité des eaux brutes fournies par ces captages que l’hydrogéologue agréé recommande pour Fontaine de Maillé d’en envisager l’abandon. Nous espérons que l’élargissement de votre périmètre d’intervention se traduira par des avancées règlementaires.

Dans cette perspective nous vous prions de bien vouloir relancer la lutte contre les pollutions diffuses en usant des textes règlementaires actualisés pour :

  • Faire bénéficier comme l’imposent le Code de la Santé Publique (L1321-2, 13, 14) et le Code de l’environnement (L215-13), tous les captages d’eau potable du département de périmètres de protection définis dans des arrêtés de DUP. Nous demandons de prioriser les captages les plus vulnérables et notamment ceux qui font l’objet d’arrêtés de dérogations.
  • Programmer la révision de tous vos arrêtés de DUP qui ne comportent pas de prise en compte des pollutions diffuses en commençant par les captages classés prioritaires et sensibles par le SDAGE en fonction de l’objectif de prévention de toutes les pollutions y compris diffuses.

Votre droit d’édicter des prescriptions liées aux pollutions diffuses est défini dans le Code de la Santé Publique (L1321-2 ; R1321-13 et 14). Ce rôle des Périmètres de Protection est rappelé dans la fiche N° 8 du document du Ministère de la Transition Ecologique consacré à la « Protection de la Ressource » : ils visent « à protéger contre toutes les pollutions et, a minima, contre les pollutions ponctuelles et accidentelles ». Le Ministère confirme plus loin : « les mesures prises dans le cadre des Protections des captages d’eau (PPC) n’excluent pas les mesures de protection contre les pollutions diffuses » (Page 4, « Focus sur les PPC »).

  • Introduire dans vos arrêtés, révisés ou nouveaux, des prescriptions limitant la fertilisation azotée et interdisant l’usage des pesticides dans tous les cas où les teneurs moyennes en nitrates dépassent les 40 mg/l et où des pics dépassent les 50 mg/l ; dans tous les cas où des pics de pollution par pesticides s’approchent des valeurs limite de 0,1 microgramme par litre pour chaque molécule et de 0,5 microgramme pour l’ensemble des molécules détectées.

Ces dispositions concerneront, outre les périmètres immédiats et rapprochés, tout ou partie des périmètres de protection éloignés selon les préconisations de l’hydrogéologue agréé.

  • Prescrire dans vos arrêtés, révisés ou nouveaux, une délimitation des périmètres de protection adaptée à la prévention des pollutions diffuses chroniques et non plus seulement à la prévention des pollutions accidentelles.
  • Prescrire, dans le cas de périmètres de protection éloignés très étendus, d’identifier les secteurs les plus contributeurs en nitrates et pesticides afin de pouvoir prioriser ultérieurement vos prescriptions en les adaptant à l’hétérogénéité des territoires et des modes d’occupation des sols.
  • Prescrire la définition des Aires d’Alimentation de Captage dans le cadre de la révision des arrêtés de DUP et la prescrire systématiquement dans les nouveaux arrêtés afin de faciliter, au-delà de vos prescriptions, des mesures volontaires prises à l’échelle des AAC dans le cadre de contrats territoriaux.

Je vous remercie par avance, Monsieur le Préfet, de bien vouloir prendre en compte nos propositions et vous prie d’accepter mes sentiments dévoués à l’intérêt public.

Le Président de Vienne Nature, Michel Levasseur

@C.MILLET_PCN
Conférence L’eau potable en Poitou-Charentes

Conférence L’eau potable en Poitou-Charentes

 

Dans le cadre du 39e Festival International du Film Ornithologique de Ménigoute, Poitou-Charentes Nature en partenariat avec Mainate et Radio Gatine et avec le soutien de la DREAL et la Région Poitou-Charentes, organise une conférence gratuite :

« L’eau potable en Poitou-Charentes : situations, problèmes et solutions possibles »

Samedi 28 octobre de 10h à 12h, salle Romane à Ménigoute

Depuis plusieurs dizaines d’années, de nombreux captages d’eau potable ont fermé en Poitou Charentes, suite à des pollutions d’origine agricole : pollution aux nitrates, mais aussi aux pesticides. Dans un contexte de raréfaction progressive de la ressource, avec des sécheresses et canicules répétées, la régression des zones humides, la fourniture d’une eau potable de qualité, tant en quantité qu’en qualité, se pose de plus en plus. Il existe pourtant des solutions : développement de l’agriculture biologique, conservation des prairies, boisement d’une partie des périmètres de captages… Cette conférence fait le point sur les constats et les solutions applicables, bien trop peu mises en avant par les politiques publiques.

Cette conférence enregistrée par Mainate et rediffusée par Radio Gatine se compose de deux parties :

  • Première partie : présentation du sujet par différents intervenants
    • Christian Medeau, directeur du Syndicat d’eau de Lezay
    • Damien Ladiré, coordinateur régional de la cellule RE Sources
    • Un autre invité à venir…
  • Deuxième partie : réponses des intervenants aux questions du public

Nous serions heureux de vous accueillir parmi nous ; la conférence sera suivie d’un apéritif.