Les insectes

Avec 36 000 espèces d’insectes en France métropolitaine, ce groupe faunistique apparaît comme l’un des plus importants au plan de la diversité biologique.

En Poitou-Charentes, il est actuellement impossible de fournir une estimation fiable du nombre d’espèces présentes. Seuls quelques ordres sont bien connus. Il s’agit notamment des libellules, des orthoptères (sauterelles, grillons et criquets), des cigales ou des papillons diurnes. Les connaissances sont partielles pour quelques groupes complexes comme les papillons nocturnes, certaines familles de coléoptères. On ne connaît quasiment rien des autres ordres qui composent pourtant l’essentiel de l’entomofaune !

Des demoiselles en péril

Les libellules ont fait l’objet d’un programme d’étude régional de quatre années ayant mobilisé près de 200 naturalistes et ayant permis la collecte de plus de 61 000 données. De cette campagne d’étude découle la publication d’un ouvrage faisant l’état des connaissances acquises ; un travail remarquable et accessible ayant peu d’équivalents en Europe, qui décrit les espèces, leur biologie, leur répartition et propose des actions concrètes de conservation.
L’inventaire débouche aussi sur la publication d’une Liste rouge des libellules menacées du Poitou-Charentes. Ce ument attribue aux soixante-huit espèces inventoriées un statut de conservation selon les critères de l’UICN [32]. Cette étude révèle qu’une espèce sur trois est menacée de disparition à court terme au plan régional.

[Photo] – Le cœur copulatoire, formé par les libellules en accouplement, offre toujours un spectacle original. Cliché de Philippe Jourde (LPO)

Le syndrome du papillon

Les papillons diurnes font actuellement l’objet du même type de démarche. D’importantes campagnes des prospections de terrain ont été lancées en 2009. En quatre années, elles permettront de couvrir l’ensemble du territoire régional. Parallèlement, l’analyse des collections et des publications anciennes permettent d’établir de passionnantes comparaisons entre les faunes du 20e et du 21e siècle. Les premières constatations sont affligeantes : six espèces semblent d’ores et déjà avoir disparu et près de la moitié des 111 actuellement présentes sont devenues localisées, rares et menacées. Il apparaît que les papillons diurnes constituent un des groupes faunistiques les plus affectés par la dégradation des écosystèmes de la région.

[Photo] – Les populations régionales de Fadet des laîches sont d’importance internationale. Cliché de Philippe Jourde (LPO)

A la recherche des papillons

L’Atlas des papillons du Poitou-Charentes est en cours. Cent onze espèces ont déjà été inventoriées et 21 000 observations centralisées. Un important travail de cartographie reste à mener ! Chacun peut y contribuer à sa manière, en participant aux séances de formation et en se lançant sur le terrain…

Disparition des stridulations ?

L’inventaire des orthoptères est en cours de réalisation mais nos connaissances sont encore lacunaires. L’utilisation récente de détecteurs d’ultrasons, qui permettent de repérer les espèces dont les stridulations sont inaudibles à l’oreille, a modifié sensiblement notre vision de l’abondance relative des espèces. Le Méconème scutigère (Cyrtaspis scutata), considéré comme très rare il y a peu encore, s’est par exemple révélé être à la fois abondant et largement réparti. Malheureusement, toutes les espèces n’apportent pas d’aussi bonnes nouvelles. D’après les données anciennes, il apparaît que de nombreux orthoptères ont fortement décliné. C’est par exemple, le cas du Criquet migrateur (Locusta migratoria), dont on observait jusque dans les années 1950 des rassemblements de millions d’individus, qui est aujourd’hui rare et menacé.

Des actions urgentes

La région Poitou-Charentes a une forte responsabilité pour la conservation de plusieurs espèces dont elle abrite l’essentiel des effectifs (Leste à grands stigmas, Oedipode des salines par ex.) ou dont les populations sont au bord de la disparition (Leucorhhines).

[Photo] – L’essentiel de la population française de l’Oedipode des salines se concentre dans les prés salés de Charente-Maritime. Cliché de Philippe Jourde (LPO)

Des actions de conservation doivent rapidement être mises en œuvre. Elles passent notamment par la préservation des habitats dont dépendent les espèces les plus menacées. Les naturalistes, associés aux gestionnaires d’espaces, ont d’ores et déjà entrepris des programmes d’urgence. Des restaurations ou créations de mares, des acquisitions foncières ont été réalisées parallèlement à la mise en œuvre de suivis permettant d’évaluer l’évolution des insectes les plus rares. Mais le travail à mener reste énorme. Parmi les plus importants défis à relever, demeure celui de la réalisation d’inventaires pertinents sur des groupes encore méconnus.

Le retour de la splendide Macromie

La Macromie splendide est une libellule endémique du sud-ouest de la France et de péninsule Ibérique qui a été découverte dans les années 1860 sur le fleuve Charente, aux environs de Jarnac et jamais revue depuis. Dans le cadre de l’atlas des libellules du Poitou-Charentes cette belle espèce a été retrouvée, plus d’un siècle après sa première observation. Elle est aujourd’hui connue des rivières Dronne, Palais et Charente et fait l’objet d’un suivi attentif.

Autres invertébrés… les araignées

A ce jour, sur les 1569 espèces d’araignées inventoriées en France, 243 ont été recensées en Poitou-Charentes mais 219 supplémentaires sont potentiellement présentes. Le nombre d’espèces avérées reste, de plus, très inégal selon les départements (3 pour les Deux-Sèvres, 21 pour la Vienne, 48 pour la Charente et 202 pour la Charente-Maritime).

Les araignées, présentent de faibles possibilités de déplacement et une grande sensibilité aux conditions climatiques et à la structure de l’habitat. De ce fait, elles peuvent donc apporter des informations essentielles sur l’état de conservation des milieux naturels. Malgré ces caractéristiques, elles ne sont que peu ou pas prises en compte dans les actions de conservation de la biodiversité. Aucune espèce ne s’est vu accorder un statut de conservation ou de protection en France. Cet état de fait ne traduit pas un meilleur état de santé des espèces d’araignées par rapport à certaines espèces de vertébrés mais plutôt de l’étendue de notre ignorance à leur égard.

Pour la plupart totalement inoffensives, les araignées méritent d’être mieux connues et préservées car elles constituent un maillon indispensable de nombreuses chaînes alimentaires et participent ainsi au bon fonctionnement de nos écosystèmes.

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