Rédacteur : Jean Terrisse
Physionomie – structure
Sous cette appellation sont regroupées un ensemble de communautés de structures et de physionomies très contrastées mais dont le point commun est de se situer à l’interface entre les milieux terrestres et les milieux aquatiques où elles constituent des ceintures végétales clairement zonées et facilement repérables en bordure de biotopes humides de nature variée : mares, étangs, lacs, ruisseaux ou rivières à courant lent. Les variations brusques des conditions physico-chimiques le long de gradients spatiaux raccourcis expliquent l’organisation fréquente de ces communautés en ceintures distinctes et rapprochées dont chacune possède des caractéristiques biologiques adaptées.
Au sein de cet ensemble disparate, une coupure majeure peut être faite entre les habitats liés aux systèmes oligotrophes et ceux inféodés aux biotopes eutrophes. Aux premiers appartiennent les communautés à utriculaires qui occupent des eaux stagnantes, peu profondes et pauvres en nutriments mais riches en acides humiques et les gazons amphibies des rives de plans d’eau sur substrat sableux ou graveleux : la pauvreté nutritive des milieux explique la structure basse (en général moins de 20 cm) des espèces végétales constitutives. Les seconds regroupent les différents types de roselières qui, malgré leur diversité de faciès, possèdent en général une architecture beaucoup plus élevée (jusqu’à 3m pour certaines roselières) et nécessitent une disponibilité beaucoup plus forte en sels biogènes. Des cortèges faunistiques diversifiés peuplent ces habitats en réponse à cette diversité structurale.
Caractéristiques biologiques
Dans le cas des habitats oligotrophes, les types biologiques sont assez variés puisque les utriculaires sont des hydrothérophytes qui passent l’hiver sous forme de bourgeons spécialisés (les « hibernacles ») qui flottent ou coulent au fond de l’eau, alors que les littorelles et les isoètes sont des hémicryptophytes vivaces. La pauvreté nutritive du substrat et/ou des eaux et les fortes variations saisonnières du plan d’eau étant des conditions très contraignantes pour les végétaux structurant ces habitats, ceux-ci ont développé des adaptations spécifiques telles qu’une phénologie tardive ou la suspension du processus de floraison si les conditions hydriques sont inadéquates : la littorelle peut ainsi se maintenir longtemps au stade végétatif tant que le niveau de l’eau lui est défavorable. Bien que la dissémination des semences soit ici souvent effectuée par l’eau (hydrochorie), un transport des spores de certains isoètes par des vers de terre a été parfois invoqué. Leur nature oligotrophique rend ces habitats très vulnérables aux altérations d’origines anthropiques (stabilisation du niveau, envasement, eutrophisation, pollution).
Malgré leur grande diversité de faciès – une quinzaine dans la région, selon l’espèce dominante – les roselières hautes ou basses présentent une plus forte homogénéité biologique : il s’agit le plus souvent de peuplements denses de grandes Monocotylédones érigées subsistant l’hiver sous forme de rhizomes allongés enfouis dans la vase (hélophytes) et qui donnent naissance au printemps suivant à des tiges aériennes dressées munies de feuilles typiquement lancéolées-linéaires. Contrairement aux bas-marais, les Cypéracées sont rarement dominantes et le substrat plus souvent minéral qu’organique. À l’inverse des habitats précédents, les eaux et le sol sont en général chargés en éléments nutritifs ; ce facteur, associé à un approvisionnement en eau constant et à un éclairement important, explique la croissance rapide de ces communautés, leur forte biomasse et leur rôle dynamique essentiel dans l’évolution des hydrosystèmes (atterrissement, ralentissement du courant, accumulation de matière organique). Plus plastiques et moins exigeants que les habitats précédents, ils peuvent se maintenir dans, voire coloniser, des milieux plus ou moins bouleversés par les activités humaines. Leur complexité structurale en fait par ailleurs des biotopes de choix pour de nombreux groupes faunistiques (Oiseaux, Odonates, Mollusques).
Les prairies flottantes à petits hélophytes forment un groupe un peu à part de roselières basses s’étendant en nappes plus ou moins larges le long des cours d’eau à faible courant ; elles offrent une forte résilience à la pollution et aux contraintes mécaniques (piétinement par le bétail, faucardage).
Espèces caractéristiques
Anas platyrhynchos, Gallinula chloropus, Rallus aquaticus | |
Arvicola sapidus, Lutra lutra, Mustela lutreola | |
Anax imperator, Ischnura elegans | |
Deroceras laeve, Oxyloma elegans, Succinea putris, Zonitoides nitidus | |
Dolomedes fimbriatus |
Classification
- Dépressions inondées à utriculaires
- Communautés acidiphiles SPHAGNO-UTRICULARION MINORIS
- Communautés neutro-alcalines SCORPIDIO-UTRICULARION MINORIS
- Gazon amphibie des grèves
- Végétation occidentale des eaux peu profondes ELODO-SPARGANION
- Pelouses méso-hygrophiles à Isoète épineux OPHIOGLOSSO-ISOETION HYSTRICIS
- Roselière basse à moyenne
- Communautés dulcicoles PHRAGMITION PP., PHALARIDION PP., OENANTHION AQUATICAE
- Communautés subhalophiles SCIRPION COMPACTI
- Roselière haute PHRAGMITION
- Prairie flottante à petits hélophytes GLYCERIO-NASTURTIETEA
Deux faciès contrastés des rivages avec végétation