Coupes forestières

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie – structure

Les coupes et/ou clairières forestières correspondent à des habitats transitoires dont l’origine peut être double : soit elles sont générées par des phénomènes catastrophiques naturels (trouées, chablis dus aux coups de vents ou aux tempêtes, incendies provoqués par la foudre) et elles participent alors aux cycles de régénération naturelle des forêts, soit elles sont le fait d’une intervention humaine dans le cadre d’une exploitation raisonnée de la forêt. Un ensemble de modifications écologiques majeures par rapport à la situation intra-forestière antérieure est cependant commun à ces 2 situations :
une brusque augmentation des flux lumineux : la lumière directe du soleil peut frapper durant plusieurs heures par jour (durée variable selon l’étendue et la forme de la trouée) des secteurs restés à l’ombre pendant plusieurs décennies consécutives ;
des variations de températures et de degré hygrométrique accrues : alors que le microclimat sous-forestier est très tamponné, les écarts quotidiens et saisonniers entre les températures maximales et minimales ont tendance à s’accroître au sein de la clairière (effet du rayonnement nocturne, brassage de l’air…) ;
une augmentation de l’hydromorphie du sol : la disparition des arbres, en arrêtant localement l’effet de pompage, a tendance à provoquer une remontée de la nappe ;
une stimulation de l’activité biologique : l’augmentation de la température favorise l’activité de la faune du sol et accélère la décomposition biochimique de la litière, ce qui augmente les taux de substances nutritives disponibles pour les végétaux.

Caractéristiques biologiques

Ces circonstances provoquent la levée de dormance de graines présentes dans le sol depuis des dizaines d’années et l’arrivée de d’une flore opportuniste, souvent à nette tendance nitrophile (notamment sur sols calcaires), favorisée par la bonne nitrification du sol. La flore forestière antérieure résiste plus ou moins bien à ce changement brusque de conditions environnementales (les plantes vernales, habituées à se développer avant la feuillaison des arbres, sont moins perturbées que les espèces estivales, fleurissant habituellement à l’ombre), alors que des adventices (Phytolacca, Conyza, Erigeron) font souvent une brève apparition dans ces milieux éphémères. La dynamique de la végétation est en général rapide (moins toutefois sur certains sols acides colonisés par les ronciers extensifs ou des nappes de Fougère aigle) : en moins de 5 ans, la végétation herbacée cède la place à divers arbustes dont le Saule marsault Salix caprea est le plus caractéristique et la cicatrisation du tissu forestier s’achève en une vingtaine d’années avec l’apparition de semences d’essences de première grandeur à partir de la banque de graines du sol ou grâce à l’aide d’oiseaux (Geai des chênes Garrulus glandarius) ou de micromammifères (Mulot gris Apodemus sylvaticus).
Classiquement, la végétation des clairières et coupes s’ordonne autour de 2 pôles selon le pH du sol ; on distingue ainsi :
les clairières et coupes sur sol baso-neutrophile (ATROPION BELLADONAE) : la flore y est diversifiée et riche en nitrophytes, la dynamique rapide et le passage au stade arbustif précoce ;
les clairières sur sol acide (EPILOBION ANGUSTIFOLII) : la flore y est moins riche, les nitrophytes parfois absents et la dynamique beaucoup plus lente, parfois bloquée par des ronciers ou des ptéridaies denses qui gênent la régénération de la forêt.
Dans les conceptions modernes de la phytosociologie, ces alliances, qui étaient autrefois séparées dans une classe de végétation à part (les EPILOBIETEA) sont maintenant regroupées avec les classes d’ourlets, avec lesquels elles présentent effectivement beaucoup d’affinités floristiques (la strate herbacée des clairières étant interprétée comme un ourlet interne, par opposition à celle des ourlets externes des lisières de la forêt ) : classe des TRIFOLIO-GERANIETEA SANGUINEI (ourlets calcicoles) pour l’ATROPION BELLADONAE et classe des MELAMPYRO-HOLCETEA MOLLIS (ourlets acidophiles) pour celle de l’EPILOBION ANGUSTIFOLII.

Espèces caractéristiques

Cirsium vulgare, Fragaria vesca, Hypericum perforatum, Rubus gr.fruticosus, Salix caprea, Senecio sylvaticus

Classification

Coupes, clairières sur sol acide et nappes de Fougère aigle

  • EPILOBION ANGUSTIFOLII

Coupes, clairières sur sol neutro-basophile

  • ATROPION BELLADONAE